Le premier banc de calcaire extrait était appelé banc cadette. L’extraction se poursuivait en profondeur au fur et à mesure de l’exploitation de la carrière.

La Carrière d’Aubigny présente l’intérêt de n’avoir jamais été exploitée avec des outillages mécaniques.

Seuls deux outils venus de l’Age du Fer ont été utilisés :

  • la Lance, lourde barre de fer pointue à une extrêmité, suspendue par une chaîne à un support
  • l’Aiguille plus petite, sans support.

Pour extraire un bloc de pierre, on dit un blot, le Carrier balançait la lance et creusait deux tranches verticales sur une profondeur d’un mètre. Ensuite à l’aide de l’aiguille tenue à deux mains, il effectuait la tranche en plafond. Enfin à nouveau avec la lance, il creusait une large tranche basse appelée le four.

Exécuter ce travail sur un blot de cinq tonnes demandait cinq à six jours.

Au cours de la deuxième étape, l’ouvrier encastrait des coins de bois sec dans une des tranches verticales. L’atmosphère de La Carrière est saturée en eau à 80%. Les pièces de bois absorbaient l’humidité ambiante et gonflaient. Elles poussaient le blot sur le côté, et celui-ci se cassait dans sa partie arrière au fond des tranches. Le bloc basculait en avant, sur les chandelles, des morceaux de pierre installés par les carriers pour amortir la chute du blot.

Dès le 19e siècle, les carriers ont utilisé la scie crocodile, le croco de carrier, pour scier l’arrière du bloc. Cela permettait d’obtenir une face arrière bien dressée, et d’accélérer la production.

Le blot était tiré sur des rouleux de fer à l’aide d’un treuil appelé crapaud, mis en place sur un chariot, le fardier. Les blots étaient acheminés par voie d’eau, ou en convois muletiers. À Paris les convoyeurs vendaient mules et chariots et rentraient à pied.

Le travail des Carriers

Un ouvrier carrier sortait un demi mètre-cube de pierre par jour. Il était payé selon sa production, à la surface de tranche effectuée. Dans les carrières modernes, les carriers qui découpent la pierre avec des haveuses, des grosses tronçonneuses à pierre, extraient quatre mètres-cube par jour.

La Carrière souterraine d’Aubigny a été exploité sur une hauteur moyenne de 12 à 16 mètres. Le ciel de La Carrière est d’un seul banc de pierre d’une épaisseur de 15 à 25 mètres.

Pourquoi une carrière souterraine ?

Dans La Carrière, la pierre est remplie d’eau. Lorsqu’elle est exposée à l’air extérieur, l’eau s’évapore, entraînant du carbonate de chaux et autres sels minéraux, de l’intérieur de la masse vers la surface du bloc. Les sels se déposent à la surface et forment une pellicule qui protège la pierre qui ne peut plus réabsorber d’eau, et par conséquent geler. Cette croûte de calcite est le Calcin.

C’est pour cette raison essentielle que l’on extrait le calcaire en souterrain.

Des traces diverses

Dans La Carrière, vous remarquez plusieurs types de traces sur les parois et les plafonds.

  • Les stries sont les traces d’aiguilles et de lances.
  • Les faces lisses d’extraction sont les traces des scies crocodiles et non pas d’outillage mécanique comme on pourrait le croire.
  • Les séries verticales de trous ont été produites par les crémaillères du support de la lance.
  • Les petits trous au sol sont les marques des gouttes d’eau qui suintent des plafonds où dans quelques milliers d’années apparaîtront des stalagtites.
  • Les taches noires aux plafonds sont les traces des lampes utilisées par les carriers. Les ouvriers ont utilisé jusqu’au milieu du 19e siècle des lampes à huile. Ce petit ustensile de cuivre ou de laiton où baignait une mèche dispensait peu de lumière et beaucoup de fumée ! Vers 1830, la lampe à acétylène, ou lampe à carbure, est apparue. Elle comporte deux réservoirs ; dans celui du bas on place du carbure de calcium, dans celui du haut, de l’eau. Un robinet permet de faire goutter l’eau sur le carbure, une réaction chimique produit un gaz inflammable, l’acétylène. Les traces laissées par les lampes à acétylène sont beaucoup plus discrètes que celles des lampes à huile. En vous promenant dans La Carrière, vous voyagez dans le temps ! Regardez les plafonds : les traces d’éclairage vous indiqueront à quelle époque vous vous trouvez !